PORTRAITS D'AUTEURS - 21 mai 2018

 


CANALE Antonio (extrait de notre Encyclopédie LUG, vol III)

CARCUPINO Fernando

CAMPION Geoff

DE VITA Antonio (DEVI) (extrait de notre Encyclopédie LUG, vol III)

EMBLETON Ron

McLOUGHLIN Denis

MAIRANI Alvaro (extrait de notre Encyclopédie LUG, vol III)

MÉDINA Roger (extrait de notre Encyclopédie LUG, vol III)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Antonio De Vita (DEVI)


Chaotique destin que celui du dessinateur italien Antonio De Vita, connu essentiellement sous sa signature Devi. Né le 26 avril 1923 à Tropéa, en Calabre, il a une enfance et une adolescence pénibles. La Calabre est une région pauvre, le pays tout entier connaît des difficultés économiques, la famille de De Vita est divisée. Antonio, pour subsister, acccepte un poste d’instituteur : entre 1943 et 1947, il sillonne les petits villages, voyageant à pied, parfois la nuit, pour effectuer des remplacements. (1)


En avril 1947, il se rend à Milan pour tenter sa chance dans le dessin, un domaine qui l’a attiré tout jeune. Il débute une carrière timide aux éditions Alpe, commençant par mettre en images Razzo Bill, un banal héros western comme il en existait tant dans la bande dessinée italienne d’après-guerre. On ne lui confie d’ailleurs que des tâches subalternes, comme celle de compléter la collection Gaie Fantasie consacrée aux histoires humoristiques de Pipo (Cucciolo). C’est ainsi que ses superbes adaptations de contes vont se retrouver perdues à la fin de ces fascicules et laisseront les exégètes italiens indifférents. On y trouvait pourtant déjà les prémisses de son art : un dessin d’une extrême finesse, des décors baroques, une atmosphère mystérieuse. Les traductions françaises sont presque toutes parues en récits complémentaires à la SAGE dans Le Petit Shériff.


La « chance » de De Vita sera la rencontre avec Marcel Navarro, le directeur des éditions LUG. Une chance toute relative car, aux six années de travail intense qu’elle va lui apporter, succèderont quarante années d’oubli, on va voir pourquoi.
Le Chevalier d’Harmental
En 1954, Navarro possède plusieurs idées de scénarios et il recherche un dessinateur pour les illustrer. Il en fait part à Leonello Martini, l’un des responsables des éditions Alpe, qui lui propose De Vita. Mieux inspiré que son confrère italien, Navarro ne tarde pas à découvrir les étonnantes qualités de cet auteur et à les exploiter. La première réalisation de De Vita est fort bien enlevée mais reste classique : il s’agit de l’adaptation d’un roman de cape et d’épée d’Alexandre Dumas : Le Chevalier d’Harmental (2). Visiblement, De Vita est à l’aise dans cette fresque historique : duels pleins de panache, personnages très élégants dans leurs atours d’époque soigneusement restitués. Il se contente toutefois de suivre fidèlement Dumas.

La Dame de Monsoreau
Il enchaîne avec La Dame de Monsoreau, toujours du Dumas, mais qu’il présente sous un autre titre : L’Aigle de Clermont, surnom du personnage principal, Bussy d’Amboise (3). L’action du roman se situe au XVIe siècle, au milieu des intrigues de la Cour de France, et le récit relate la romantique et tragique histoire d’amour entre la belle Diane de Méridor et Bussy d’Amboise. Une lecture parallèle avec la bande dessinée permet de constater qu’après une entrée en matière strictement conforme à l’œuvre du romancier (4), De Vita s’en écarte résolument, supprimant des passages non essentiels au profit des combats et des rebondissements.
Dans une seconde époque intitulée Le Chevalier de la Vengeance (5), Bussy d’Amboise réapparaît mais masqué. Diane est enlevée. Bussy se retrouve prisonnier d’une étrange reine sur une île inconnue (ép. 11 à 17), une digression bien dans le style de De Vita qui aime mettre en scène des civilisations inconnues et hors du temps. Il reprend ensuite le fil du récit. La conclusion est lyrique: se méprenant, Bussy croit que Diane le trompe et on le voit, cavalier solitaire, galoper désespérément dans la nuit…
La troisième partie, sous-titrée La Perle de Ahjndar, ne paraîtra que trois années plus tard (6). Bussy aborde encore sur une île mystérieuse où l’attendent des aventures épiques. L’auteur plonge une nouvelle fois son héros au cœur d’un étrange royaume, dans lequel des clans s’affrontent pour la conquête du pouvoir : toujours fidèle à Diane, Bussy repousse l’amour de la princesse Saadia. Réduit en esclavage, il participe à un tournoi. Vainqueur, il reçoit la perle qui fait de lui le prince de Ahjndar…
Le Cavalier sans nom, quatrième et dernier volet de la saga, sera proposé seulement en 1977 ! En effet, les éditions LUG, après avoir réédité les trois premières parties dans le bimensuel Blek (n°277 à 315), en profitent pour compléter enfin le cycle (7), non sans avoir curieusement gardé toutes ces planches inédites pendant seize années ! Malheureusement, les couleurs très primaires de Blek n’ont pas le charme de la bichromie des Pipo: de retour sur le sol français, Bussy a perdu la mémoire et le Duc de Guise, qui convoite le trône, en profite pour le manipuler. Mais tout finira bien !

 

Le Petit Duc

L’Aigle de Clermont est réalisé à raison de 24 planches par mois, beaucoup d’auteurs s’en contenteraient, mais pas le prolifique De Vita qui en rajoute 32 autres ! Car, durant cinq ans, il va mener de front deux séries pour les éditions LUG : L’Aigle de Clermont dans Pipo et Le Petit Duc dans Kiwi (8) : paru en bande complémentaire, derrière le trappeur italien Blek le Roc, ce récit va captiver toute une génération de lecteurs, transportés dans un univers irréel, aux décors exhubérants et surdimensionnés.
Mirko, duc de Méloupin, est un jeune et frêle adolescent, brutalement arraché à sa quiétude dans sa villa de Turgel : son pays, la Maldovie (9) est envahi par la belliqueuse Mocranie. Son vieux tuteur est abattu sous ses yeux et Mirko doit fuir précipitamment.
Cette entrée en matière est identique au prologue de Piccolo Re, une bande dessinée italienne publiée par les éditions Alpe en 1949, scénarisée par Leonello Martini. On est en terrain connu, d’autant que c’est Marcel Navarro en personne qui a traduit cette série en français (10). L’éditeur lyonnais n’a jamais caché cette filiation, il a donc fourni à De Vita une trame de départ. Mais là où Le Petit Roi s’enlise dans un scénario à l’eau de rose devenu aujourd’hui illisible, Le Petit Duc devient une flamboyante épopée sous la plume magique de De Vita.
Prenant comme prétexte que Mirko veut retrouver son père, disparu on ne sait ni où ni pourquoi, l’auteur retire son héros du cadre trop réducteur d’une histoire de résistance et le fait voyager dans des contrées lointaines et des mondes ignorés. La quête de Mirko l’entraîne aux Indes (ép.11 à 14) où il découvre sa sœur Mina, puis dans une cité souterraine futuriste (ép. 15 à 20), en Afrique contre les hommes-léopards (ép. 21 à 23), au Kanshi, mystérieux pays de légende dirigé par une reine (ép. 24 à 33). Il entrevoit son père en de rares occasions et toujours dans des circonstances précaires. Le mystère s’épaissit, il est impossible de saisir la finalité de ces aventures aux rebondissements incessants. Le lecteur, impuissant mais subjugué, est aspiré dans cet univers indéfinissable qu’il ne peut décrypter.

De retour dans sa patrie, Mirko prend une part active à la résistance et sa route croise celle du Justicier Masqué, le chef des rebelles, qui n’est autre que son père (ép. 34 à 43). Des fantômatiques hommes encapuchonnés obéissent aux ordres d’un savant en cybernétique qui a construit un robot géant (ép.44 à 50). Une dernière étape conduit Mirko et Mina en Amérique du Sud, à la recherche du trésor des Incas (ép. 51 à 64), avant l’apothéose de la libération de Maldoror (ép. 65).
Dernière planche du Petit Duc !


Pendant son périple, le Petit Duc sera confronté à des ennemis intransigeants, placé dans des situations périlleuses, mis en demeure de subir des épreuves surhumaines. Comment oublier ce passage où il est enfermé dans le labyrinthe de la mort ? (ép. 31 et 32). Il se bat toujours vaillamment, compensant sa faible corpulence par une agilité de félin, mettant à profit tous les secrets de l’art de la lutte enseignés par son maître, le géant Stenka, usant d’intelligence et d’astuce face à la tyrannie aveugle et à la force brutale. Mais il sait également faire preuve de compassion ou de clémence envers ses adversaires, et ses qualités morales sont à la hauteur de son engagement physique.
Etalé sur plus de 2000 pages, Le Petit Duc possède un scénario formidablement complexe et touffu, enchevêtrement presque surréaliste de tous les thèmes imaginables exploités par les films et les romans de série B.
Le graphisme, tout à la plume, est d’une grande finesse, plus proche de la gravure que de la bande dessinée. De Vita utilise les contrastes de manière unique : ses grands aplats noirs imprègnent en permanence le récit d’une atmosphère onirique dont on cherche en vain un équivalent chez d’autres auteurs.
Avec ses ombres inquiétantes, ses décors baroques, ses personnages aux regards perçants, écrasés par des architectures disproportionnées et à la gestuelle amplifiée à l’extrême, Le Petit Duc symbolise le mystère et l’angoisse à l’état pur.

Le début du mystère Devi
Début 1961, la collaboration de De Vita aux éditions LUG cesse brusquement, la conclusion du Petit Duc étant hâtivement exécutée dans le Kiwi n°69 du 10 janvier 1961. Plus aucune trace de la fameuse signature Devi dans les publications de l’éditeur lyonnais sauf sous forme de réédition. Les petits lecteurs de l’époque, fortement marqués par les images de cet univers halluciné, grandissent mais n’oublient pas. Commence alors une mythification sans précédent pour un auteur de petit format (11).
C’est Jean-Pierre Dionnet qui brise la première lance dans un article court mais évocateur sur Le Petit Duc paru dans Galaxie n°102 (novembre 1972). Il y avoue ne rien connaître sur l’auteur, ce qui me suggère l’idée d’écrire à Marcel Navarro, qui a la gentillesse de me répondre aussitôt. Il m’apprend que Devi est italien et qu’il se nomme De Vita, renseignements que j’inclus immédiatement dans un article sur Le petit Duc qui paraît dans le n°9 de Submarine, en 1973. J’en transmets un exemplaire, accompagné d’une copie de la lettre de Marcel Navarro, à Dionnet, lequel rebondit et concocte un nouvel article avec ces données dans Charlie Mensuel n°76 (mai 1975). Dionnet est dithyrambique : Devi est le « plus grand méconnu de la BD » et Le Petit Duc est l’ « un des rares chefs d’œuvre authentiques de l’histoire de la bande dessinée » !
L’année suivante, Jacques Sadoul est le premier à citer Le Petit Duc dans une encyclopédie sur la BD (Panorama de la Bande Dessinée, éditions J’ai Lu, mars 1976).
Vient la période où j’alerte en vain tous les fans italiens de BD, peine perdue, aucun n’a jamais entendu parler de cet auteur, que certains confondent d’ailleurs avec Pier Lorenzo De Vita, un dessinateur au style et à la carrière pourtant bien distincts.
En 1980, les éditions Horus entreprennent une édition en albums des séries de De Vita. Vont paraître deux volumes du Petit Duc, deux Aigle de Clermont et un Harmental, le seul à être intégral. J’écris une préface pour laquelle Marcel Navarro me fournit par téléphone quelques indications biographiques, malheureusement vagues.

En mars 1995, mon encyclopédie LUG des Petits Formats propose une analyse du Petit Duc qui se termine par une interrogation prémonitoire : « Né dans les années vingt, il (De Vita) est peut-être encore en vie ».
En 1998, un passionné, Jean-Yves Guerre, crée un site internet sur Mirko le Petit Duc. Il y rassemble un maximum de documentation, synthétisant tout ce qui est connu. Mais les e-mails échangés avec les spécialistes italiens n’apportent aucune lumière sur De Vita qui reste toujours totalement méconnu dans son pays. Ce site me paraît pourtant à l’époque la voie la plus efficace pour retrouver de Vita ou l’un de ses proches.

En 2000, les éditions SEMIC commencent une nouvelle réédition du Petit Duc, faisant réintégrer ce héros en seconde partie du mensuel Kiwi (n°540 du 10 avril 2000). Je signe l’introduction. Dans le numéro suivant, j’écris un article intitulé La grande énigme du Petit Duc en y posant la question : « Est-il toujours vivant ? Mystère. ». Comment imaginer que la réponse va bientôt surgir ?

Le mystère Devi dévoilé
C’est le titre d’un ouvrage de Jean-Yves Guerre, qu’il a auto-publié en juillet 2002. Lorsqu’il me l’a remis en mains propres, le vendredi 5 juillet, j’ai reçu un choc émotionnel. Oui, Antonio De Vita est toujours en vie, en retraite avec son épouse Vittoria, dans un village d’Italie. Étonné d’apprendre qu’il est l’objet d’un culte, qu’on le réédite, qu’on l’encense, convaincu que tout le monde l’avait oublié. Etonné qu’on le recherche, lui qui ne s’était jamais caché.
Mais comment Jean-Yves Guerre l’a-t-il retrouvé ? Ce Sherlock Holmes de la BD a écrit à tous les A. De Vita de l’annuaire italien ! Coïncidence extraordinaire, il reçoit en 2001 une réponse d’un certain Angelo De Vita qui affirme avoir connu un Antonio De Vita habitant sur le même palier et oeuvrant dans les « fumetti ». Chargé par Guerre de retrouver Antonio, Angelo y parvient (et voilà pourquoi le bouquin de Guerre est dédié à Angelo De Vita, sans lequel Devi, qui est sur liste rouge, serait resté inaccessible !). L’aspect le plus étonnant de cette enquête, c’est que de simples courriers ont réussi là où Internet n’a rien donné !

Bien entendu, le mensuel Kiwi de la SEMIC s’est fait l’écho de cette étonnante nouvelle : le n°568 d’août 2002 annonçait en couverture : Devi, l’auteur du Petit Duc, retrouvé. Quant au n°570, deux mois plus tard, il affichait une couverture inédite signée Devi et dessinée en 2002 ! Et Thierry Mornet, rédacteur en chef, nous en promet d’autres…

La version italienne du Petit Duc
Dans les archives de De Vita, Jean-Yves Guerre a découvert, découpées, les pages d’une version italienne du Petit Duc, rebaptisé Robin. Conçue directement pour les éditions LUG, la série a donc bénéficié d’une traduction chez Alpe où elle est parue en bande complémentaire dans le mensuel Trapper John (12), mais démarrant seulement à l’épisode 7 et avec un début d’histoire différent pour lequel De Vita a dessiné quatre planches inédites. Trapper John n’ayant vécu que 10 numéros de 1959 à 1960, Robin s’est certainement interrompu à ce moment-là.

 

 

 

 


De Vita et le cinéma


De Vita fournit des indications techniques sur sa méthode, avouant qu’il travaillait très vite, effectuant un épisode complet du Petit Duc, soit 32 planches, en dix jours seulement ! Cela lui laissait du temps pour aller au cinéma et l’on comprend mieux les nombreuses références cinématographiques qui émaillent son œuvre.
Ainsi, certaines séquences de l’Aigle de Clermont sont très proches des duels à l’épée livrés par Gene Kelly, d’Artagnan bondissant dans Les Trois Mousquetaires de George Sydney (1948) : voir notamment le moment où d’Artagnan passe par les toîts pour ramener les ferrets à la reine. Quant à Bussy, au début, il a les traits de l’acteur Jean Marais.

L’ouverture d’un épisode du Petit Duc (ép. 33) s’inspire de L’Aigle du Désert, film d’aventures de Frederick de Cordova (1950), véritable conte des mille et une nuits. La majeure partie de l’épisode 44, sans aucun lien avec l’action du moment, fait référence à un grand classique italien : La Strada (1954).
Quant à Dionnet, il établit un parallèle entre l’univers de Devi et un film de Roy Rowland assez curieux : Les cinq mille doigts du Docteur T. (1953), dans lequel un petit enfant rêve qu’il est prisonnier d’un tyran qui l’oblige à jouer avec 499 autres enfants sur un clavier gigantesque.

La coupure de 1961
Pourquoi De Vita a-t-il brutalement cessé toute collaboration avec les éditions LUG en 1961 ? Selon la version de Marcel Navarro, De Vita aurait disparu sans laisser d’adresse. On apprend dans l’ouvrage de Guerre qu’il existait un contrat entre LUG et les éditions italiennes Alpe (contrat dont De Vita n’eut connaissance que plus tard) : en employant De Vita, LUG devait, tout en le rémunérant, régler une commission à Alpe. Pour éviter ces frais supplémentaires, l’éditeur lyonnais chercha à s’approprier l’exclusivité de son travail et lui demanda de venir s’installer en France. De Vita raconte que, peu désireux de quitter son père malade, il refusa et LUG le somma alors de mettre un terme à ses séries en cours, d’où l’explication de la fin frustrante du Petit Duc , condensée en quelques pages.
Ainsi, l’aspect financier serait l’unique motif de cette rupture ? Le lecteur ne peut qu’être déçu par cette révélation. De Vita clame que lui souhaitait poursuivre Le Petit Duc et L’Aigle de Clermont. Quel gâchis !

 

 

 

 

 

 


De Vita après 1961


En même temps qu’il travaillait pour LUG, De Vita fournissait quelques bandes à Alpe, et voilà que ces deux portes se referment. En 1963, il participe à Maschera Nera, un western de seconde catégorie des éditions Corno, dont un épisode est traduit en France dans Bengali n°23 sous le nom du Justicier Masqué.
Puis, jusqu’en 1977, il illustre une encyclopédie chez Fenu, pour laquelle il livre de superbes dessins en couleurs. Entre-temps, il s’est marié en 1965. En 1966, il écrit à LUG sans même obtenir de réponse ! (Marcel Navarro m’a dit ne pas se souvenir d’avoir reçu ce courrier). Il tombe malade et doit abandonner le dessin. Pour subsister, il est contraint de travailler en usine, jusqu’en 1988 où il prend sa retraite.
N’est-il pas aberrant qu’un artiste de cette trempe ait été employé dans une usine ?


Notes :
1. Les éléments biographiques de cet article proviennent de l’ouvrage de Jean-Yves Guerre Le mystère Devi dévoilé..
2. Pipo du n°44 (20.12.1954) au n°56 (5.6.1955) – sauf au n°51 – soit 12 épisodes de 12 planches. Réédité dans Ombrax du n°100 au n°110.
3. Pipo du n°57 (20.6.1955) au n°75 (5.2.1956) – sauf aux n°58, 63, 71 – soit 16 épisodes de 12 planches. Réédité dans Blek du n°277 au n°292.
4. Les dix-huit premières planches de De Vita adaptent les trois premiers chapitres du roman de Dumas. Les épisodes 9 et 10 adaptent partiellement et librement les chapitres 12 à 14 etc
5. Pipo du n°76 (20.2.1956) au n°100 (20.12.1956) – sauf aux n°79, 86, 90, 99 – soit 21 épisodes de 12 planches. Réédité dans Blek du n°293 au n°307.
6. Pipo du n°178 (5.10.1959) au n°193 (20.5.1960) soit 16 épisodes de 12 planches. Réédité dans Blek du n°308 au n°315.
7. Blek du n°316 (5.4.1977) au n°328 (5.4.1978) soit 26 épisodes de 12 planches.
8. Kiwi du n°1 (10.9.1955) au n°69 (10.1.1961) – sauf aux n°41, 45, 49, 52 – soit 65 épisodes de 32 planches. Réédité dans Blek du n°135 au n°276. En cours de réédition dans Kiwi depuis le n°540 (10.4.2000).
9. Afin d’éviter tout amalgame avec la Moldavie, une république d’Europe de l’Est, les éditions LUG transformeront ce nom en Maldoror, un changement qui aura l’avantage supplémentaire de faire référence à Lautréamont. La Maldovie apparaît dans les pages publicitaires pour le lancement de Kiwi, pages insérées dans les autres publications de la maison, puis revient de temps à autre, oubliée par le correcteur.
10. Le Petit Roi est paru aux éditions Aventures et Voyages (dont Marcel Navarro était à l’époque l’un des dirigeants !) dans Brik Yak et a été réédité en petit format dans Diavolo.
11. Dans un autre registre, le dessinateur Vica fut longtemps, lui aussi, l’objet d’un mystère tenace.
12. Le personnage de Trapper John est une copie de Blek réalisée pour les éditions LUG et publiée dans Nevada du n°1 au n°90. Traduit en Italie par Alpe, Trapper John a été le titre d’un mensuel qui vécut 10 numéros en 1959-60.

 


Cliquez pour voir le magnifique travail de DEVI (200 ko env)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

     

DENIS McLOUGHLIN


Toute une génération de dessinateurs britanniques est en train de disparaître dans l’indifférence quasi –générale (qui a parlé du décès de Ron Turner, l’un des maîtres absolus de l’illustration de S.F., survenu en 1998 ?). Denis McLoughlin était aussi une grande figure de cette école anglaise de dessinateurs réalistes dont la carrière se mit en place dès l’immédiat après-guerre et qui oeuvrèrent durant des décennies dans l’anonymat le plus complet, les journaux anglais de BD répugnant à imprimer les noms des auteurs. Malgré son âge avancé (il était né le 15 avril 1918), Denis McLoughlin était encore en activité, produisant des récits de guerre pour COMMANDO, un petit format de la DC Thomson qui a dépassé les 3000 numéros en 1996, lorsque la mort le surprit le 22 avril 2002, quelques jours après son quatre-vingt quatrième anniversaire.
Après avoir arrêté ses études à quatorze ans pour entrer dans une école d’art à Manchester, il commence à travailler dès 1934 (catalogues, illustrations, couvertures). Mais c’est véritablement en 1945 que sa carrière prend tournure, lorsqu’il est engagé par Boardman, un éditeur londonien qui importait du matériel des Etats-Unis. Pendant plus de vingt ans, McLoughlin illustre des centaines de couvertures pour la version britannique des romans noirs américains (notamment tous les Fredric Brown) et des comic-books. Il crée également deux héros en BD : « Roy Carson Special Agent » (1948-1954), un policier « hard-boiled » et « Swift Morgan » (1948-1953), un héros de science-fiction qui traverse le temps et l’espace à la rencontre d’anciennes civilisations. Il devient l’illustrateur attitré des BUFFALO BILL ANNUAL (1949-1961), volumes cartonnés bourrés de superbes et chatoyants dessins aux détails minutieux, très soignés, dont il assure l’intégralité du contenu, chacun lui demandant six mois de labeur ! (Je n’avais pas résisté au plaisir d’en publier un récit en six planches « The Dime Novel King », relatant la vie du créateur de Buffalo Bill, dans le fanzine LE PETIT DETECTIVE).

Quand Boardman cesse ses activités, en 1967, McLoughlin se tourne vers Amalgamated Press (Fleetway). Son premier héros est « Saber King of the Jungle », un tarzanide blond créé par Joe Colquhoun (ép. 1) pour l’hebdomadaire TIGER (1967-1969). Il en prend le relais avec brio (ép. 2 à 10), introduisant notamment des scènes spectaculaires avec des animaux préhistoriques. Rebaptisé en France « Yataca », le personnage est publié dans le mensuel éponyme des éditions Aventures et Voyages, du n°22 au n°30. Avec « Fury’s Family » (THUNDER puis LION, 1970-1971), il met en images un jeune garçon qui connaît le langage des animaux, sur un scénario de Angus Allan. La version française est parue dans YATACA du n°58 au n°74 sous le titre « La Famille de Nohey ».

Pendant deux ans, McLoughlin s’investit dans une encyclopédie du western : « Encyclopedia of the Wild West » , Doubleday, 1973. En 1974, il commence à travailler pour la DC Thomson, fameux éditeur installé en Ecosse, auquel il restera fidèle, livrant diverses séries d’aventures aux nombreux hebdomadaires de la maison : WIZARD, VICTOR, BUDDY, BULLET… Certaines ont été traduites en France :
- « Wolf Boy » (dans WIZARD en 1977) est une très belle saga viking se déroulant dans des paysages enneigés (BUFFALO BILL du n°19 au n°21, éditions Jeunesse et Vacances).
- Dans « Terror in the Tall Tower » (WIZARD 1974-1975), un jeune anglais hérite d’un gratte-ciel de Manhattan dont les profondeurs, truffées de passages souterrains, cachent une effrayante pieuvre géante. Ambiance garantie. (LA MAISON DU MYSTERE n°2, réédité au n°15, éditions Arédit).


- L’action de « The Green Lizard » (WIZARD 1977) se passe sur une île inconnue où vivent des hommes-poissons au milieu de bêtes impressionnantes. Remarquables dessins (KING COBRA n°11, éditions Arédit)
Toutes ces adaptations, en petit format, avec des planches réduites et remontées, ne donnent qu’un faible aperçu du talent de McLoughlin.
A partir de 1982, les éditeurs anglais de BD ne publient presque plus rien et, vu l’étroitesse du marché, Denis McLoughlin est contraint de se rabattre sur la collection COMMANDO PICTURE LIBRARY, récits complets de guerre en 64 planches dont il fournira environ 160 numéros pendant vingt ans.
A l’instar d’un Ron Turner, Denis McLoughlin maîtrisait aussi bien la couleur que le noir et blanc. Soucieux de la précision et du détail, il remplissait chacune de ses cases au maximum, utilisant une grande densité de hachures, ce qui conférait à ses planches un rendu final assez étonnant et très caractéristique. Son dessin ciselé est aisément identifiable et a conquis de nombreux fans.

Gérard THOMASSIAN

Bibliographie :
- The Hardboiled Art of D. McLoughlin, 1994, par David Ashford.
- On pourra aussi consulter le site internet consacré à l’œuvre de Denis McLoughlin et
récemment implanté par un admirateur américain, Matthew Gore.